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Joan d'Orel a son atelier et un salon d'exposition dans le 8e arrondissement à Paris.

Dans le silence sacré les oeuvres y naissent et incitent à la contemplation poétique et lyrique de la création; un univers indéfinissable s'étale.

Dans l'introduction d'un de ses catalogues, Hélène Lassalle, Conservateur en Chef du Patrimoine au Louvre et auteur de plusieurs ouvrages sur l'art écrit:

 

L’alchimie du peintre

Sur la toile, la chair de la peinture, sans apprêt, sans vernis. Elle est là, lisse et calme. Ni frisson, ni effroi. Une douce lumière l’imprègne, égale, qui semble venir de sa texture même. Une lumière du matin, celle des longues plages en attente de la marée haute, ou bien celle du désert avant l’accablement du soleil, de villes lointaines dans une brume légère de début de jour annonçant le réveil. Le monde est serein, de silence et de clarté. La chair de la peinture est là, tranquillement posée dans toute sa densité et son onctuosité. Elle dit le plaisir du peintre dans le secret de l’atelier.

La touche est large et épaisse, nourrie à l’huile, aplanie au couteau. Sur la toile blanche une couche de préparation a été maçonnée à la terre d’ombre brûlée dont les reflets terreux et sanguins transparaissent à travers les couches de la peinture, comme chez les maîtres anciens, donnant chaleur et profondeur. Peu à peu les strates de la matière picturale ont été étalées, l’une après l’autre, largement, en pleine pâte.

L’artiste travaille debout. Sa toile est posée à l’horizontale, sur des tréteaux ou par terre. Il en a une vision aérienne. Plus d’horizontale ni de verticale, plus de perspective : le paysage est purement mental, sans référence à quelque représentation du monde naturel. La composition est improvisée, s’élaborant peu à peu, entraînée par le geste, dérivant dans le silence. Absorbé par sa concentration sur la toile qui occupe alors tout son espace visuel, l’artiste ne peut en rien être distrait de sa peinture. Du reste aucune image, aucun objet autour de lui, en dehors des chevalets et des châssis appuyés la face contre le mur, ne rappelle le monde extérieur. La lumière du tableau elle-même n’a rien à voir avec l’éclairage des heures. L’atelier du peintre est obscur, les volets toujours clos. Au plafond, des tubes fluorescents diffusent une clarté aussi anonyme que banale. La lumière du tableau vient de la couleur, des matières pressées directement du tube et mélangées en masse sur la palette. Ce sont des couleurs lumineuses de terre, de sable, d’eau et de ciel. Sur la table qui porte les instruments, les tubes écrasés laissent encore lire les inscriptions sur leurs étiquettes salies ou déchirées à force d’usage : « terre de Sienne brûlée naturelle », « terre ombrée naturelle », « jaune cadmium », « violet de cobalt », « blanc de titane », « ocre jaune », « noir d’ivoire ». Parfois un vermillon annonce un flamboiement soudain, qui contrastera avec la délicatesse des teintes de l’ensemble. La chimie de l’usine conduit à l’alchimie de l’atelier. L’alchimie de l’atelier mène aux mirages de la salle d’exposition.

Le tableau né du paysage mental de l’artiste,  ce monde apaisé fait d’équilibre, de pureté, de sérénité, d’harmonie, va esquisser sur les murs, de cadre en cadre, petit ou grand, selon le point de vue du spectateur désormais : vertical — le plus souvent — ou horizontal, des évocations visuelles différentes pour chaque visiteur. Chacun va y projeter souvenirs ou état d’âme. Ce sera pour l’un un appel au voyage, pour l’autre les échos d’une musique, vision d’autrefois ou familière. A chacun son appropriation. Mais restera toujours présente la chair lumineuse de la peinture.

Hélène Lassalle
Conservateur en chef du Patrimoine

 

 

 

 

 
         

© 2005 Joan d'Orel